martes, 16 de junio de 2015

A Saint-Germain-des-Prés, la librairie La Hune ferme ses portes



Fondée au sortir de la guerre par des intellectuels résistants, La Hune va céder la place à un commerce de reproductions photographiques.
 
A quelques minutes de la fermeture, on se presse dans la librairie. Sur un coin de table, une bouteille de champagne, quelques briques de jus de fruit sont à la disposition des clients mais le coeur n'est pas à la fête. Miguel Dupont, libraire depuis 25 ans à La Hune, a les larmes aux yeux.

Il ne reste qu'une librairie boulevard Saint-Germain

Déjà en mai 2012, La Hune avait dû quitter son siège historique du 170 boulevard Saint-Germain pour être transférée au 18 rue de l'Abbaye, ancienne adresse de la librairie Le Divan. Celle-ci avait déménagé dans le 15e arrondissement en 1996 et laissé la place à une boutique Dior. Les anciens locaux de la Hune ont été loués à Louis Vuitton.  Nouveau signal d'une gentrification du quartier, qui explique en partie l'extinction du mythe littéraire. Sur le boulevard Saint-Germain, il ne reste  désormais qu'une librairie, "L'écume des pages".
 
"La librairie accumulait trop de handicaps", estime Olivier Place, directeur des Librairies Flammarion, interrogé par l'AFP. Le chiffre d'affaires a en effet baissé de 35% depuis 2009. Certains clients estiment que Gallimard a laissé tomber La Hune, ce que réfute Olivier Place.
La Hune, librairie du groupe Flammarion depuis 1976, est passée sous la houlette du groupe Madrigall, lors du rachat de Flammarion par Gallimard en  2012.

Sophie Calle : "C'était ma librairie"

Les derniers clients dont Julien Dray, vice-président du Conseil régional d'Ile-de-France chargé de la Culture, se pressent à la caisse, les bras chargés de bouquins. L'artiste Sophie Calle tient à être la dernière cliente à régler ses achats : deux livres de poche. "J'avais acheté le dernier livre à l'adresse historique de La Hune. J'ai acheté le premier à la nouvelle adresse  et me voilà aujourd'hui. C'est comme un rituel", dit l'artiste. "C'était ma  librairie", ajoute-t-elle.
 
Le rideau de fer s'abaisse. Une gerbe est déposée devant l'entrée. "Merci à tous", dit Miguel Dupont de plus en plus ému. Quelques applaudissements fusent des dizaines de clients, badauds et touristes massés au dehors, vite couverts par des huées. "Où est la ministre de la Culture ?", demande un homme.
              
La librairie employait quatre CDI et sept salariés en CDD. Ils devraient être reclassés dans une des deux autres librairies du groupe Flammarion (Centre Pompidou, Paris et Metz). Mais l'inquiétude est palpable. "Gallimard ne fait pas ce qu'il faut faire et a beaucoup de mal à nous recaser à égalité de compétence et de qualification", estime Miguel Dupont. "Ca pose un gros  problème", dit-il en notant que le personnel "n'a pas de dialogue avec Gallimard".

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